Quel est le préjudice indemnisé en cas de rupture brutale et comment est-il évalué?
La rupture d’une relation commerciale établie est autorisé dès lors qu’elle n’est pas brutale.
La brutalité se déduit de l’absence ou de l’insuffisance du préavis notamment au regard de la durée des relations. L’antériorité de la relation sert à déterminer la durée du préavis et le montant de l'indemnisation en cas d’absence ou d’insuffisance de préavis. S'il y a lieu d'indemniser la brutalité de la rupture, le montant de l'indemnité sera calculé en fonction de la marge brute générée par le volant d'affaire confié au partenaire commercial et de la durée des relations commerciales antérieurement à la rupture. Le délai de préavis suffisant s’apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances au moment de la notification de la rupture sans tenir compte des éléments survenus après la rupture (reconversion ou changement d’activité dans des conditions favorables) (Cass. com., 9 juillet 2013 – n° 12-20.468).
La rupture constitue le point de départ pour l'évaluation du préjudice qui est apprécié en fonction de la marge bénéficiaire brute à laquelle la partie victime aurait pu prétendre si un préavis raisonnable avait été accordé. l'ancienneté des relations commerciales
Pour déterminer la durée du préavis qui aurait dû être octroyé, il est tenu compte de l’ancienneté des relations et de la natures des services et des biens concernés par le contrat et de la situation de dépendance.
Le respect du délai de préavis prévu contractuellement peut ne pas suffire au regard de la durée des relations. La victime d’une rupture brutale est en droit de demander des dommages-intérêts afin d’indemniser : -la perte de chiffre d’affaire qu’elle aurait pu escompter si un préavis raisonnable avait été donné -les pertes annexes résultant des investissements effectués spécialement pour le client ayant brutalement rompu la relation -plus rarement compte tenu de la difficulté d'en rapporter la preuve, le préjudice moral ou la perte d’image causés par la brutalité de la rupture. a quoi correspond la marge brute?
La marge brute se calcule en faisant la différence entre le prix de vente d'un produit ou service et son coût de revient, c'est-à-dire le coût de production ou d'acquisition.
Elle est considérée comme la notion comptable qui permet d'indemniser la victime de la rupture brutale d'une relation commerciale établie de son gain manqué, en couvrant l'ensemble de ses charges. La moyenne du préavis accordé par les juges est d’un mois de marge bénéficiaire brute par année d’ancienneté des relations. En principe, la marge perdue est calculée sur la moyenne des trois derniers exercices clos précédents le jour de la résiliation. Attention, le préjudice indemnisé ne correspond pas à X mois de Chiffre d'Affaire mais à X mois de marge brute. CA Paris, 4 mars 2011, FigaroMedias c/ Calgagno . - CA Aix-en-Provence, 2 mars 2011, Transports Ascencio c/ Fabemi Provence ). Pour mieux comprendre comment est indemnisé le préjudice résultant d'une rupture brutale, voici un exemple tiré de la JP : Compte tenu de la durée des relations contractuelles (4 ans), du caractère exclusif de la concession avec clause de non-concurrence et des investissements importants réalisés par le concessionnaire depuis 2007, le préavis raisonnable à respecter doit être fixé à 6 mois. Le préjudice résultant de la rupture brutale de la relation commerciale établie correspondant à la marge brute qui aurait pu être réalisée pendant la durée du préavis non accordé. Sur la base d'un chiffre d'affaires moyen mensuel de 4795 euros et d'un taux de marge brute de 32 pour-cent, le préjudice est fixé à 9206 euros. Cour d'appel, Nancy, 5e chambre commerciale, 29 Octobre 2014 - n° 13/03034 La marge brute et l'assiette de calcul de l'indemnité en cas de rupture brutale d'un relation commerciale établieLa période de référence prise en compte dans la détermination de la marge brute escomptée varie de 1 à 5 ans en fonction de l’ancienneté de la relation commerciale.
Il appartient à la victime de démonter la marge brute escomptée sur la base des usages et du chiffre d’affaires réalisé antérieurement au désengagement du donneur d’ordre. Ce montant doit être validé par un expert comptable.
L'évaluation du préjudice se fait généralement au regard de la marge brute dont la victime aurait pu bénéficier si son partenaire avait respecté un délai de préavis suffisant.
Peuvent également être réparés : - le préjudice résultant de l'engagement de frais en pure perte, - de l'atteinte à l'image de l'entreprise, - l’engagement de frais, - la désorganisation provoquée par la rupture, en particulier lorsque l'entreprise se trouvait en état de dépendance économique vis-à-vis de l'auteur de la rupture parce qu'elle réalisait une grande partie, voire la totalité, de son chiffre d'affaires avec ce dernier. Quelles sont les conditions pour obtenir un doublement de l’indemnisation ? Distribution d’un produit ou d’une pièce sous marque? En 2009, dans trois affaires, le fournisseur sollicitait le bénéfice du doublement légal du délai de préavis prévu par le texte pour les produits vendu sous marque de distributeur. Ce dispositif vise à lutter contre le déréférencement brutal dans le domaine de grande distribution. Il s’applique dès lors que : - le distributeur vend les produits de son fournisseur sous une marque lui appartenant - et ces produits sont fabriqués selon les spécifications du distributeur. Une décision applique ce dispositif.
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La rupture brutale des relations commerciales en dix questions - dossier complet
Qu’est-ce qu’une relation commerciale établie? Quand la rupture d'une relation commerciale est-elle considérée comme brutale ? La rupture d'une relation commerciale en elle-même est-elle sanctionnée? La rupture brutale d'une relation commerciale peut-elle être partielle? Quelle est la durée du préavis requis en cas de rupture d'une relation commerciale établie? ->Quel est le préjudice indemnisé en cas de rupture brutale d'une relation commerciale établie ? Comment le donneur d’ordre peut-il s’exonérer de sa responsabilité en cas de rupture brutale d'une relation établie? La crise économique peut-elle justifier la rupture brutale d'une relation commerciale établie ? Comment notifier un désengagement à un partenaire commercial? Comment et dans quels délais pour agir en cas de désengagement brutal? Quelles sont les questions que le partenaire victime de désengagement brutal doit se poser avant d’agir? L. 442-6, I, 5° du Code de commerce:
« Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : […] 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n’était pas fourni sous marque de distributeur. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d’inexécution par l’autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure." Le Médiateur inter-entreprise a établi une liste des mauvaises pratiques dans la relation de sous-traitance. La liste de ces pratiques et les fondements législatifs qui permettent de les sanctionner est consultable sur le site de la Médiation Inter-entreprise.
Parmi ces mauvaises pratiques figure la rupture ou la menace de rupture de relations commerciale établie dès lors que celle-ci est brutale. Elle engage la responsabilité de celui qui se désengage sans préavis de sa relation suivie, stable et habituelle auprès d'un partenaire ou qui lui accorde un préavis qui ne tient pas compte de la durée effective des relations commerciales établies. |