Comment le donneur d’ordre peut-il s’exonérer de sa responsabilité en cas de rupture brutale d'une relation commerciale établie ?
Pour écarter l’application de l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce les juges se fondent sur l’inexécution d’une obligation de la part du sous-traitant ou du fournisseur, ou la force majeure comme le texte les y invite.
Il arrive également que l’intervention de causes extérieures (une baisse de commandes de la part du donneur d’ordre principal) soient prise en compte et ce bien que les causes exonératoires sont textuellement limitées à la force majeure et à la faute du partenaire. Pour le donneur d’ordre il s’agit donc de démontrer:
Ainsi, afin de ne pas engager la responsabilité de sa société lorsque l'on souhaite se désengager d'une relation durable avec un partenaire économique, il convient à la fois:
Le modèle de notification de désengagement présenté par Tous Droits Réservés permet à la fois d'informer le partenaire économique du désengagement et de faire démarrer la durée du préavis. L’objectif du préavis n'est pas uniquement d'informer le fournisseur, prestataire ou sous-traitant de la fin de la relation. Il s'agit également de permettre une reconversion du prestataire en lui donnant le temps de se réorganiser durant une période au cours de laquelle un volant d’affaire similaire à celui précédemment confié sera maintenu (moyenne sur les trois dernières années d’après la jurisprudence) puis très progressivement diminué. Il n’existe pas de barème permettant de déterminer de manière précise et officielle la durée exacte du préavis qui doit être accordé. Pour autant un examen de la jurisprudence permet de dégager des tendances. Les tribunaux accordent un mois de préavis par année de relation commerciale, la durée de préavis retenue étant rarement inférieure à 4 mois. A l’inverse, un préavis supérieur à 2 ans n’a jamais été constaté dans la jurisprudence. Les juges se réfèrent le plus souvent à la durée des relations antérieures pour apprécier le caractère suffisant ou non du préavis de rupture en prenant en compte la durée du préavis auquel la victime aurait eu droit si la rupture n’avait pas été brutale. Les circonstances économiques de crise peuvent-elles justifier une rupture brutale de relations commerciales établies ?
Traditionnellement, les juges considèrent que les impératifs du marché ne dispensent pas l’auteur de la rupture de respecter un préavis écrit tenant compte de la durée des relations.
Quelques arrêts récents ont cependant pris en considération les circonstances économiques et permettent de considérer que la disparition d'un débouché ou la diminution de la demande avale pourrait justifier une réduction proportionnelle de l'approvisionnement en amont de la chaîne économique.
Ainsi, il ressort de la jurisprudence récente que le sous-traitant devra démontrer que la baisse des commandes résulte au moins en partie de la propre stratégie du donneur d’ordre ou d’un changement de cette dernière au regard des relations historique entre les parties. En cas de rupture brutale se traduisant par une baisse de commande significative, la victime devra démontrer que : - cette baisse est exceptionnelle au regard de l’historique de la relation et que le sous-traitant n’avait aucun moyen de la prévoir ou de l’anticiper compte tenu de la progression constante du volant d’affaire sur une période conséquente, - que la baisse des commandes procède d’un choix et d’une stratégie délibérée de la part du donneur d’ordre.
rupture brutale et dépendance économique
En cas de rupture d'une relation commerciale établie, le préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances, notamment de l'état de dépendance économique de l'entreprise évincée. En cas d'insuffisance du préavis, le préjudice en résultant est évalué en fonction de la durée du préavis jugée nécessaire.
« Il en résulte que la victime de la rupture ne peut prétendre à une indemnisation complémentaire au titre de son état de dépendance économique, cette circonstance ayant déjà été prise en compte pour la détermination de son préjudice consécutif à la brutalité de la rupture » (Cass com 20 mai 2014, n°13-16398). La situation de dépendance économique peut donc être donc prise en compte dans l’évaluation du préjudice subi du fait de la rupture brutale mais cela peut parfois se retourner contre la victime. Il peut lui être reproché d’avoir contribué à son dommage en s’abstenant de diversifier son activité sans pour autant être liée par une exclusivité. Attention, pour notifier la fin d'une relation commerciale établie, un simple courrier même en recommandé ne suffit pas. Il faut que le courrier envoyé témoigne d'une véritable volonté de la part de la personne qui souhaite mettre fin à la relation d'accompagner son désengagement. Le préavis est destiné à laisser à son partenaire commercial le temps et les moyens de se retourner, de trouver d'autres débouchés, de se réorganiser et de faire face à la perte de chiffre d'affaire engendrée par le désengagement du donneur d'ordre. C'est pourquoi le désengagement d'une relation commerciale doit être progressif pour que la rupture ne soit pas brutale. |
Qu’est-ce qu’une relation commerciale établie?
Quand la rupture d'une relation commerciale est-elle considérée comme brutale ? La rupture d'une relation commerciale en elle-même est-elle sanctionnée? La rupture brutale d'une relation commerciale peut-elle être partielle? Quelle est la durée du préavis requis en cas de rupture d'une relation commerciale établie? Quel est le préjudice indemnisé en cas de rupture brutale d'une relation commerciale établie ? ->Comment le donneur d’ordre peut-il s’exonérer de sa responsabilité en cas de rupture brutale d'une relation établie? La crise économique peut-elle justifier la rupture brutale d'une relation commerciale établie ? Comment notifier un désengagement à un partenaire commercial? Comment et dans quels délais pour agir en cas de désengagement brutal? Quelles sont les questions que le partenaire victime de désengagement brutal doit se poser avant d’agir? L. 442-6, I, 5° du Code de commerce:
« Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : […] 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n’était pas fourni sous marque de distributeur. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d’inexécution par l’autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure." Le Médiateur inter-entreprise a établi une liste des mauvaises pratiques dans la relation de sous-traitance. La liste de ces pratiques et les fondements législatifs qui permettent de les sanctionner est consultable sur le site de la Médiation Inter-entreprise.
Parmi ces mauvaises pratiques figure la rupture ou la menace de rupture de relations commerciale établie dès lors que celle-ci est brutale. Elle engage la responsabilité de celui qui se désengage sans préavis de sa relation suivie, stable et habituelle auprès d'un partenaire ou qui lui accorde un préavis qui ne tient pas compte de la durée effective des relations commerciales établies. |