Quelle est la durée du préavis du désengagement requis en cas de rupture d'une relation commerciale établie?
La rupture d’une relation commerciale établie est autorisé dès lors qu’elle n’est pas brutale.
La brutalité se déduit de l’absence ou de l’insuffisance du préavis notamment au regard de la durée des relations. Afin de ne pas engager la responsabilité de sa société lorsque l'on souhaite se désengager d'une relation durable avec un partenaire économique, il convient à la fois: -de notifier la fin de la relation à venir -d'accorder un préavis au partenaire (une durée pendant laquelle le donneur continue comme par le passé à passer commande auprès de son partenaire). Il n’existe pas de barème permettant de déterminer de manière précise et officielle la durée exacte du préavis qui doit être accordé. Pour autant un examen de la jurisprudence permet de dégager des tendances. Les tribunaux accordent un mois de préavis par année de relation commerciale, la durée de préavis retenue étant rarement inférieure à 4 mois. A l’inverse, un préavis supérieur à 2 ans n’a jamais été constaté dans la jurisprudence. Les juges se réfèrent le plus souvent à la durée des relations antérieures pour apprécier le caractère suffisant ou non du préavis de rupture en prenant en compte la durée du préavis auquel la victime aurait eu droit si la rupture n’avait pas été brutale. Attention, pour notifier la fin d'une relation commerciale établie, un simple courrier même en recommandé ne suffit pas. Il faut que le courrier envoyé témoigne d'une véritable volonté de la part de la personne qui souhaite mettre fin à la relation d'accompagner son désengagement. Le préavis est destiné à laisser à son partenaire commercial le temps et les moyens de se retourner, de trouver d'autres débouchés, de se réorganiser et de faire face à la perte de chiffre d'affaire engendrée par le désengagement du donneur d'ordre. Le préavis ne peut donc être de pure forme et les juges apprécient l’adéquation de la durée du préavis au regard de la réalité du maintien du courant d’affaires pendant cette période. Le préavis est effectif et retire à la rupture son caractère brutale lorsqu'il correspond à une période d’activité normale, durant laquelle la relation se poursuit sur un même volume d’échanges que par le passé et aux mêmes conditions. Les juges tiennent également compte dans l’évaluation du préjudice :
- des usages de la profession, - des possibilités de reconversion de la victime de la rupture, - de l’importance du chiffre d’affaires réalisé par la victime avec l’auteur de la rupture, - parfois de son état de dépendance économique - de l’investissement nécessaires pour l’adaptation de l’outil industriel en vue d’une reconversion
Afin de ne pas engager la responsabilité de sa société lorsque l'on souhaite se désengager d'une relation durable avec un partenaire économique, il convient à la fois:
-de notifier la fin de la relation à venir -d'accorder un préavis au partenaire (une durée pendant laquelle le donneur continue comme par le passé à passer commande auprès de son partenaire en se désengageant progressivement). Le modèle de notification de désengagement présenté par Tous Droits Réservés permet à la fois d'informer le partenaire économique du désengagement et de faire démarrer la durée du préavis. Quel est le préjudice indemnisé en cas de rupture brutale et comment est-il évalué?Pour déterminer la durée du préavis qui aurait dû être octroyé, il est tenu compte de l’ancienneté des relations et de la natures des services et des biens concernés par le contrat et de la situation de dépendance.
Le respect du délai de préavis prévu contractuellement peut ne pas suffire au regard de la durée des relations. La victime d’une rupture brutale est en droit de demander des dommages-intérêts afin d’indemniser : -la perte de chiffre d’affaire qu’elle aurait pu escompter si le préavis avait été raisonnable -les pertes annexes résultant des investissements effectués spécialement pour le client ayant brutalement rompu la relation -plus rarement et difficile à prouver, le préjudice moral ou la perte d’image causés par la brutalité de la rupture La moyenne du préavis accordé par les juges est d’un mois de marge bénéficiaire brute par année d’ancienneté des relations. En principe, la marge perdue est calculée sur la moyenne des trois derniers exercices clos précédant le jour de la résiliation. Le délai de préavis suffisant s’apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances au moment de la notification de la rupture sans tenir compte des éléments survenus après la rupture (reconversion ou changement d’activité dans des conditions favorables) (Cass. com., 9 juillet 2013 – n° 12-20.468). La rupture constitue le point de départ pour l'évaluation du préjudice qui est apprécié en fonction de la marge bénéficiaire brute à laquelle la partie victime aurait pu prétendre si un préavis raisonnable avait été accordé. Attention, le préjudice indemnisé ne correspond pas à X mois de Chiffre d'Affaire mais à X mois de marge brute. CA Paris, 4 mars 2011, FigaroMedias c/ Calgagno . - CA Aix-en-Provence, 2 mars 2011, Transports Ascencio c/ Fabemi Provence ). La marge brute se calcule en faisant la différence entre le prix de vente d'un produit ou service et son coût de revient, c'est-à-dire le coût de production ou d'acquisition. Elle est considérée comme la notion comptable qui permet d'indemniser la victime de la rupture de son gain manqué, en couvrant l'ensemble de ses charges. Voici un exemple tiré de la Jutisprudence : Compte tenu de la durée des relations contractuelles (4 ans), du caractère exclusif de la concession avec clause de non-concurrence et des investissements importants réalisés par le concessionnaire depuis 2007, le préavis raisonnable à respecter doit être fixé à 6 mois. Le préjudice résultant de la rupture brutale de la relation commerciale établie correspondant à la marge brute qui aurait pu être réalisée pendant la durée du préavis non accordé. Sur la base d'un chiffre d'affaires moyen mensuel de 4795 euros et d'un taux de marge brute de 32 pour-cent, le préjudice est fixé à 9206 euros. Cour d'appel, Nancy, 5e chambre commerciale, 29 Octobre 2014 - n° 13/03034 L'évaluation du préjudice se fait généralement au regard de la marge brute dont la victime aurait pu bénéficier si son partenaire avait respecté un délai de préavis suffisant.
Peuvent également être réparés : - le préjudice résultant de l'engagement de frais en pure perte, - de l'atteinte à l'image de l'entreprise, - l’engagement de frais, - la désorganisation provoquée par la rupture, en particulier lorsque l'entreprise se trouvait en état de dépendance économique vis-à-vis de l'auteur de la rupture parce qu'elle réalisait une grande partie, voire la totalité, de son chiffre d'affaires avec ce dernier. La période de référence prise en compte dans la détermination de la marge brute escomptée varie de 1 à 5 ans en fonction de l’ancienneté de la relation commerciale. Il appartient à la victime de démonter la marge brute escomptée sur la base des usages et du chiffre d’affaire réalisé antérieurement au désengagement du donneur d’ordre. Ce montant doit être validé par un expert comptable.
Quelles sont les conditions pour obtenir un doublement de l’indemnisation ? Distribution d’un produit ou d’une pièce sous marque? En 2009, dans trois affaires, le fournisseur sollicitait le bénéfice du doublement légal du délai de préavis prévu par le texte pour les produits vendu sous marque de distributeur. Ce dispositif vise à lutter contre le déréférencement brutal dans le domaine de grande distribution. Il s’applique dès lors que : - le distributeur vend les produits de son fournisseur sous une marque lui appartenant - et ces produits sont fabriqués selon les spécifications du distributeur. Deux décisions appliquent ce dispositif.
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La rupture brutale des relations commerciales en dix questions - dossier complet
Qu’est-ce qu’une relation commerciale établie? Quand la rupture d'une relation commerciale est-elle considérée comme brutale ? La rupture d'une relation commerciale en elle-même est-elle sanctionnée? La rupture brutale d'une relation commerciale peut-elle être partielle? -> Quelle est la durée du préavis requis en cas de rupture d'une relation commerciale établie? Quel est le préjudice indemnisé en cas de rupture brutale d'une relation commerciale établie ? Quelles sont les questions que le partenaire victime de désengagement brutal doit se poser avant d’agir? Comment le donneur d’ordre peut-il s’exonérer de sa responsabilité en cas de rupture brutale d'une relation établie? La crise économique peut-elle justifier la rupture brutale d'une relation commerciale établie ? Comment notifier un désengagement à un partenaire commercial? Comment et dans quels délais pour agir en cas de désengagement brutal? L. 442-6, I, 5° du Code de commerce:
« Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : […] 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n’était pas fourni sous marque de distributeur. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d’inexécution par l’autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure." Le Médiateur inter-entreprise a établi une liste des mauvaises pratiques dans la relation de sous-traitance. La liste de ces pratiques et les fondements législatifs qui permettent de les sanctionner est consultable sur le site de la Médiation Inter-entreprise.
Parmi ces mauvaises pratiques figure la rupture ou la menace de rupture de relations commerciale établie dès lors que celle-ci est brutale. Elle engage la responsabilité de celui qui se désengage sans préavis de sa relation suivie, stable et habituelle auprès d'un partenaire ou qui lui accorde un préavis qui ne tient pas compte de la durée effective des relations commerciales établies. |